Le 9 mai, devant le siège du groupe, à Châteaulin (Finistère), les salariés manifestaient pour une revalorisation de leurs salaires. : Archives Vincent Mouchel
Lourdement endetté, l'industriel cherche un second souffle. En attendant, il perd des centaines de procès aux prud'hommes face à ses employés.
« Qu'ils se lèvent très tôt pour aller bosser ou qu'ils se couchent tard après le travail, les salariés de Doux travaillent plus, mais pas pour gagner plus », lance Raymond Gouiffes, délégué central CGT de Doux (dix-sept usines en France). Plombé par des mauvais résultats en 2007 (moins 35,3 millions d'euros) et 2006 (moins 45,3 millions d'euros), le premier groupe volailler européen affronte la fronde de salariés smicards privés, depuis 2003, du paiement des temps de pause.
« Les ennuis ont commencé, en 1998, lorsque Doux s'est surendetté pour racheter la Soprat (à La Vraie-Croix dans le Morbihan) et Frangosul au Brésil, rappelle son collègue Michel Le Guellaud, délégué CGT de l'usine de Locminé (Morbihan). Depuis on ne compte plus les restructurations et les fermetures d'usines en France. » Le groupe pèse désormais plus lourd en Amérique du Sud avec 8 000 employés qu'en France avec un peu plus de 6 000 salariés. « On reçoit d'ailleurs du jambon frais de volaille du Brésil sur notre site Père Dodu de Quimper, destiné à la grande distribution, explique Raymond Gouiffes. Le groupe importe aussi des ailes et des manchons congelés vendus à des chaînes de restauration. »
Accord RTT dénoncé
Une véritable stratégie mondiale. On est loin des années 1930 et de la petite usine de Port-Launay, près de Châteaulin. Pierre, le fondateur, entamait la grande saga industrielle de la famille Doux, classée 136e fortune de France, selon le magazine Challenge. Son fils Charles, 70 ans, a confié les rênes, en 2003, à Guy Odri, nouveau directeur général délégué. « Il est arrivé en sauveur, mais la politique est toujours la même entre fermetures et restructurations », constate Michel Le Guellaud. Le climat social s'est nettement détérioré depuis la dénonciation, en 2003, par la direction, de l'accord sur la réduction du temps de travail.
Rumeurs de mariage
Cinq délégués CGT ont mené le combat devant les prud'hommes pour récupérer le paiement des temps de pause prévu par cet accord, « soit 90 € brut par mois. » Depuis, 1 200 autres salariés ont porté l'affaire devant les tribunaux. 400 viennent d'avoir gain de cause aux prud'hommes de Lorient. La direction s'est pourvue en cassation, mais doit payer autour de 4 000 € brut pour chaque salarié. La facture pourrait grimper à 15 millions d'euros.
Un second front s'est ouvert avec les négociations salariales. Arguant de difficultés économiques, la direction propose 0,5 % de hausse. « C'est un manque de respect », peste Raymond Gouiffes. Doux cherche à se renflouer, quitte à se marier avec un autre géant de la volaille. Les noms du brésilien Perdigao et de LDC ont été évoqués.
« Le groupe n'est pas à vendre » répète à l'envi la direction. Elle a confié une mission à la banque Lazard et n'exclut pas la fermeture d'une usine d'ici à fin 2008. Contacté, Guy Odri n'a pas souhaité communiquer. En attendant l'inquiétude monte dans les usines de Locminé (450 salariés) et Blancafort (250 salariés) où l'abattage de dindes bat de l'aile.
Source Ouest-France